Ce n’est pas l’abstention qui nous inquiète
Le fait marquent des élections régionales et départementales a été le très fort taux d'abstention. Il a été largement commenté, analysé et déploré. A lire ici un point de vue différent.
Tous les partis politiques institutionnels de l’État français se sont montrés inquiets à cause du taux d’abstention historique du premier tour des élections régionales et départementales (autour de 67 % dans l’État français, celle des 18 – 24 ans allant jusqu’à 87 %). Mais qu’est-ce qui les inquiète, au juste ? C’est l’intérêt, ou l’espoir que la société aurait perdu en « la politique ». Cependant, cette « politique », c’est la politique institutionnelle bourgeoise, c’est-à-dire, la course aux voix pour gérer un système d’exploitation qui reproduit diverses oppressions. Car le premier rôle de l’État bourgeois, ses instances les plus locales comprises (département, communauté d’agglomération, mairie), c’est le maintien de l’ordre bourgeois.
Si l’on veut dépasser la « politique » ayant pour seul but la gestion des institutions bourgeoises, l’abstention n’a pas à nous inquiéter. Ceux qui participent aux élections sans avoir de telles perspectives participent à la légitimation et à la stabilité du système. Au lieu de chercher les causes profondes de l’abstention, les partis réformistes font appel la responsabilité individuelle des abstentionnistes, allant jusqu’à en faire culpabiliser certains.
Les données de l’abstention sont à prendre en compte, car elles sont l’expression de la crise du capitalisme et de ses institutions. Ce modèle de société n’a aucun avenir à offrir à de plus en plus de personnes. En parallèle à la chute de la participation électorale, nous assistons à une évolution autoritariste des États (rappelons l’adoption de la loi pour la Sécurité Globale et de celle contre le Séparatisme), et l’idéologie fasciste a le vent en poupe. La démocratie représentative n’est qu’une forme historique de la dictature bourgeoise, car démocratie ou pas, c’est cette classe qui dirige et contrôle l’ensemble du fonctionnement social. On dirait bien que la démocratie, en tant que mode de gouvernance de la bourgeoisie, est en décadence.
Il est clair qu’une grande partie de la population a rompu avec les institutions bourgeoises : ces institutions ne peuvent prétendre être les représentantes légitimes de la société. Cette rupture est une base pour essayer de faire de la politique d’une autre manière, et c’est la tâche des révolutionnaires de l’organiser. Il s’agit de passer du sentiment de rejet de cette société à la construction d’un nouveau modèle social qui serait la négation de l’ancien. Le problème de fond ne se résoudra pas en glissant un bout de papier ou l’autre dans l’urne. Le changement passera nécessairement par une organisation intégrale de la classe travailleuse, et c’est cette organisation que nous devons construire. On a du pain sur la planche, mais il n’y a pas d’autres solutions.